J’ai rencontré Daniel au festival de Frontignan. Garçon posé cachant un discret homme blessé et un évident travailleur de force. En dehors de son métier, il poursuit sur de nombreux volumes son travail romanesque publié chez Mare nostrum. Une œuvre et un éditeur qui mériteraient à mon sens une meilleure distribution. J’ai lu cet opus me semblant concerner particulièrement l’auteur. Un mort de plus dans un groupe de vendangeurs anciens franquistes, il y a du louche. Le héros récurrent se lance dans l’enquête. La 4è de couverture précise : « Facundo Trapero, jeune émigré républicain en voie d’intégration ». L’institutrice du village, qui en pince pour le bel homme, l’aide dans cette voie… Mais c’est une rude histoire de règlements de compte. En campagne viticole narbonnaise, dans les années cinquante, on se croirait au XIX ième siècle, sauf que le tableau est exact, si mes souvenirs sont bons : « les familles nombreuses des Espagnols […] préparaient leur propre repas : du pain arrosé d’huile d’olive et des alencades ! » [note de l’auteur : sardines cuites au sel]. Loin de la nostalgie biographique, Hernandez s’attache au naturalisme. Un scientifique bien renseigné. Authentique écrivain : « Les videurs, des garçons agiles, se déployèrent au milieu de l’essaim qui butinait laborieusement les souches. Tel des oiseaux de proie, ils tournaient leurs regards dans tous les sens ». Et encore, bien sûr, descendant de réfugiés républicains espagnols. Dans une aventure d’hommes marqués, chair et cerveau, des séquelles de la guerre d’Espagne. Et dans un monde si embrouillé qu’on peine à deviner les coupables, pourtant évidents. Un vrai capharnaüm, mélange de langues (français classique et termes occitans et espagnols), de paix et de guerre, de haine et d’amour, de présent et de passé… La vie, quoi !