Après avoir publié ailleurs plusieurs ouvrages, l’auteur réédite chez la Louve ce beau roman historique. L’affaire se passe à Cahors en 1221. Un usurier, sa famille et ses proches se trouvent entraînés dans une tragédie où tuent successivement chacun des quatre éléments, à commencer par le vent. « Mais qui est le vent ? » Les éléments se révèleront évidemment tenus par une main et surtout une tête. On vit à l’heure (sonnée par les prières : « matine, prime, etc. ») en un temps et un lieu bien connus de l’écrivain, quelquefois très enclin à décliner ses connaissances. Mais il parvient à nous plonger en ce monde avec ses décors : « Au bas du Pech de Magne, la boucle de l’Olt enserrait Cahors, se glissait entre les collines, en léchait le pied », ses clairs obscurs : « Bientôt d’autres lueurs, celles des hautes torchères du port, remplaceraient ces lucioles fugitives [les éphémères ] » et aussi ses odeurs, comme celle d’un héros tombé à l’eau et puant le poisson pourri… Avec surtout ses lois étranges et sauvages, ses crimes enfin. On découvrira peu à peu des rapports affectifs en fait assez modernes, pour ne pas dire psychanalytiques. L’intérêt du livre, outre une histoire bien conduite, c’est de voir vivre et aimer (et aussi crever) ces gens d’un autre temps mais du même monde que le nôtre, usuriers et banquiers tenant le haut du pavé. Pas de prétendu puritanisme en une époque et un lieu qui ne pouvaient connaître ni Calvin ni Victoria : « Ils firent l’amour… Avec fureur, comme pour arracher un éclat de lumière à cette nuit des âmes […] ils se fouillèrent, se touchèrent, s’aimèrent ». Belle lecture de vacances !