Je lis ce recueil après un autre postérieur. Nulle importance, les mots du poète sont durables, même après lui. Difficile pour moi de critiquer un livre d’un homme que j’ai tant aimé et admiré. Aîné de quelques années, il avait tout fait avant moi et mieux… Quand il est mort, on a pas mal déclamé. Quant à moi j’ai perdu un grand frère que je voyais peu, tant il était avare de lui, bien qu’aimant tout le monde. Une dizaine de publications seulement, ajoutées toutefois aux poèmes dans la revue « Action poétique ». La parole est mesurée, les actes sont prenants et les enfants à instituer occupent. Mais quelle écriture, la vraie, pesée, soufflée comme ce vent d’autan qu’il a évoqué et aussi le trombone dont il jouait. On reste pensif et vibrant à le lire. On a cité son épitaphe prématurée. Il y a tant de prémonition de la fin et pourtant d’un dur désir de durer : « J’ai l’âge de vieillir / Je vous laisse mon nom ». Il y a en son œuvre et en lui, surtout, entendement et sentiment de l’amoureux, amoureux du pays, de ses femmes, de vivre : « J’ai écouté le monde ». Je lui laisse la parole : « Toi qui lances d’un cri les boules bleues de tes cocagnes/Toi qui halètes à midi dans le feu des garrigues/Toi qui fouilles sous la robe l’humidité des filles » ; « Il y a plus à lire dans les brisures du langage que dans la pierre des sentences » ; « Poète es-tu prêt/à rencontrer l’inconnu/ que tu fus naguère ».