Hier soir, des voisins sont sortis à 20 heures dans la rue pour applaudir. Ma compagne m’expliquant que l’on applaudit les personnels soignants pour leurs efforts et leur dévouement, je comprends cela, ils vont devoir donner beaucoup et l’on espère que, si besoin est, ils nous donneront aussi.
Mais je ne peux m’empêcher d’avoir mauvais esprit en pensant à combien de morts et de souffrances auraient été économisées si nos gouvernants, au lieu de s’arc-bouter aveuglément sur leurs réformes cassant le système de services publics issus de la Libération, avaient eu la lucidité, l’énergie et la compétence d’écouter les scientifiques en préparant le pays au fléau. Je note que les asiatiques voisins de la Chine ont bien, eux, su faire face pour limiter à temps les dégâts.
Et du coup j’aimerais que les applaudissements ne soient pas dévoyés dans l’intérêt de ceux qui, même pas pudiques, n’hésitent pas à parler de « guerre » pour tenter de rassembler une union sacrée derrière leur pouvoir amplement ébranlé depuis l’automne.
Applaudir, de applaudere (en latin) signifie : battre des mains, s’emploie pour manifester enthousiasme ou approbation. La pratique des applaudissements existe depuis longtemps (elle est mentionnée dans la bible et relatée dans l’histoire du théâtre romain) comme l’expression d’une satisfaction ou d’une admiration du public pour des acteurs valeureux. Je me souviens d’avoir applaudi à des spectacles de théâtre ou à des matches de sport, plus rarement à des événements sociaux comme à l’arrivée de gens qui vinrent nous aider manuellement ou financièrement dans la rue après la catastrophe d’AZF.
Donc, nous applaudissons les médecins qui soignent pour certains sans masque, les infirmières qui pratiquent jour et nuit, les brancardiers qui s’activent à un travail harassant et risqué, etc, etc. Le spectacle de corporations se dévouant à la cause du peuple et de l’humanité vaut bien des applaudissements en ce monde que l’on a trop fait glisser dans l’égoïsme.
Un ami vient de m’envoyer un tract de la CGT à Nantes qui pose les questions suivantes après la déclaration de guerre de Macron :
« Où sont les milliards à débloquer d’urgence pour l’hôpital public ? Où sont les moyens pour recruter des soignant.es et pour mieux payer celles et ceux qui sont en première ligne depuis des semaines et pour plusieurs mois ? Où sont les milliards pour les services publics ? »
Ces questions pourraient aussi être posées à Toulouse. Quoique les établissements hospitaliers soient ici grands et compétents, leurs personnels sonnent l’alarme depuis des mois et des années pour manque de crédits et de moyens et restrictions de nombre de lits et de personnel. Or, on prédit un doublement tous les trois jours du nombre de victimes du corona virus dans le pays. Nous n’en sommes pas au Moyen-Âge, pas non plus à la Grande peste qui décima le tiers de la population toulousaine à la Renaissance, mais il est à craindre que l’imprévision et l’impéritie du gouvernement nous fassent vivre des heures terribles.
Alors, j’applaudis si l’on veut quand la nuit tombe, mais autant que possible avec lucidité.