« L’écriture est le seul pays que je connaisse où il fait bon se sentir étranger. » Telle est la formule liminaire de ces textes où l’auteur, née à Lyon, avec des ancêtres en Algérie, vécut son enfance en Bretagne et vit au Canada quand elle ne réside pas en France, en Haïti ou ailleurs. Mais tout en étant étrangère, elle est aussi autochtone du monde, de la nature où elle semble vraiment chez elle parmi la neige, les arbres et les lacs, les outardes et les papillons. Ce livre est un recueil de textes pour la plupart écrits en résidence à Vénissieux début 2014. C’est une sorte de partition composée d’une alliance de courts poèmes dans l’esprit du haïku japonais et de « longs poèmes narratifs épousant la route » et structuré en huit parties introduites par des haïkus de Kerouac à Michaux en passant par Bashô… Je laisse l’écriture à la poétesse Laure et à ses haïkus : « Rougeoyant papillon / Retourne à la feuille / Blotti contre moi / La nuit », « Papillon / Orange sombre / Du soleil » ou extraits de plus longs textes : « Mais ce matin / Ma propre respiration / M’apparaît comme un miracle », « Parfois / De rares fois / Le temps des rêves / Et celui de leur entrée / Dans la matière ne font qu’un ». Thierry Renard, éditeur de ce recueil, lui-même poète est également animateur de l’Espace Pandora qui insuffle depuis Vénissieux sa vitalité poétique à Lyon et en Rhône-Alpes. Dans l’entretien qui clôt cette édition, il assure : « Toi, on a l’impression que cette chose [la nostalgie] elle est devant. Tu n’as pas un poids. On te sent légère. » À lire pour se revigorer et aimer la poésie ainsi qu’elle le mérite.